Le Père, Théâtre Hébertot

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Critique du Père, de Florian Zeller, vu le 7 novembre 2012 au Théâtre Hebertot.
Avec Robert Hirsch, Isabelle Gelinas, Patrick Catalifo, Eric Boucher, Sophie Bouilloux, et Elise Diamant, dans une mise en scène de Ladislas Chollat

Le Père, c’est l’histoire d’un homme, André, incarné par Robert Hirsch, qui est atteint d’Alzheimer. Sa famille, en la personne de sa fille aînée, essaie de trouver le meilleur moyen pour combattre un peu la maladie. Qu’Anne, sa fille, passe le voir souvent chez lui. Puis qu’il emménage chez elle. Puis qu’on emploie une infirmière spécialisée dans l’aide aux personnes atteintes de la maladie. Tout est essayé. Et si l’histoire peut paraître banale, elle est traitée d’un point de vue assez particulier, et assez intéressant : celui d’André lui-même. Bonne idée, très bonne idée même, pourrait-on dire. Tout nous est confus, puisqu’à l’instar du malade, nous confondons les personnages de la pièces, les moments, les époques.

Oui mais voilà : tout semble flou, rien ne s’explique. Je pose un bémol. C’est là que Florian Zeller échoue, pour moi. Tout comme dans La Vérité, il a une bonne idée mais ne l’utilise pas à bon escient. C’est-à-dire que lui-même ne semble pas comprendre sa propre pièce. Tout part dans tous les sens, certaines scènes se répètent équivalentes aux précédentes, sans qu’on comprenne pourquoi. Si le metteur en scène justifie cette incompréhension par la position d’André qu’adopte le spectateur, alors il faut m’expliquer pourquoi certaines scènes, où le personnage d’André n’apparaît pas, sont répétées ? Vraiment dommage que l’on ne comprenne pas plus que ça l’histoire, les périodes, les faits, mais faisons abstraction de tout cela. Après tout, ce n’est pas pour Zeller que je venais voir le spectacle. Oh que non.

Il y a un acteur, dans ce spectacle, un acteur qui dépasse tous les autres. Il y a un monstre sacré. Il y a un très très Grand. Un immense homme. Robert Hirsch, 87 ans, incarne André. Je ne trouverais de toute façon pas les mots justes pour décrire la perfection de son jeu, de sa voix, de ses réactions, de ses mouvements. Comment décrire une telle présence ? J’étais malade ce jour-là. Des éternuements qui ne cessent pas. Croyez-le ou non, dès qu’il est entré en scène, tout a cessé. J’étais scotchée. J’étais admirative. Il est entré, il a attiré tous les regards, et les a conservés jusqu’à la fin de la pièce. Lorsqu’il parlait, avec tant d’expréience dans la voix, de cette voix puissante mais pas du tout forcée, la salle faisait preuve d’un silence religieux. Tous ses mouvements étaient si naturels, comme s’ils n’étaient pas prévus, pas calculés. Lorsqu’il le désirait, il était drôle, il paraissait jeune, il faisait des claquettes et se mouvait si rapidement, si facilement. Parfois il était très attendrissant. Déchirant, lorsqu’il appelait et demandait sa « maman ». Parfois infernal et impatient, comme un enfant. Mais globalement, le personnage était très émouvant, de par sa solitude. La maladie implique la solitude. Cette solitude, implicite, ressortait à merveille, grâce au talent de Robert Hirsch. 

Il était néanmoins bien entouré. Isabelle Gélinas, cette actrice qui possède tant de charmes, incarnait sa fille. Deuxième rôle, et même si sa voix sanglotante semblait parfois un peu forcée, elle excelle aussi. Mais qu’est-ce qu’exceller, à côté de Robert Hirsch ? C’est difficile, puisque lui est déjà si loin, si haut, si grand. Les deux hommes, que je confonds, étaient, tout comme Isabelle Gélinas, très bon, mais restaient aussi derrière André. Les scènes sans lui semblaient lentes, inutiles, monotones. Élise Diamant riait un peu faux. J’ai beaucoup apprécié Sophie Bouilloux : dans la dernière scène, elle s’éclipse en douceur derrière lui, et lui laisse son jeu, elle ne cherche pas à s’imposer, et la scène en ressort d’autant plus émouvante, d’autant plus brillante. 

Vraiment, cette mise en scène … C’est tellement dommage, qu’un acteur pareil joue dans une pièce qui aurait pu être si complète et si réussie … Mais ni le texte, ni la mise en scène ne nous éclaire … 

Ne nous mentons pas. En allant voir ce spectacle, on va voir Hirsch. On va voir un Hirsch grandiose, remarquable, un Hirsch inoubliable. Ce n’est pas qu’à l’acteur de saluer le public. C’est au public de s’incliner bien bas devant Lui. C’est au public de se lever pour acclamer, pour souligner son talent de comédien. Il faut le voir. Vous ne le regretterez pas. ♥ ♥ ♥  

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