Critique de Il faut je ne veux pas, de Musset et Besset, vu le 22 janvier 2012 au TOP, puis à 2 nouvelles reprises au Théâtre de l’Oeuvre
[ Avec Adrien Melin, Blanche Leleu, et Chloé Olivères, dans une mise en scène de Jean-Marie Besset ]
C’est encore avec le sourire aux lèvres que je commence cet article. Voilà pourquoi j’aime tant le théâtre, voilà pourquoi j’y vais tant. Une salle que je ne connaissais pas, et un horaire que je n’apprécie pas vraiment (dimanche en matinée). Et pourtant, quel spectacle !
Jean-Marie Besset met ici en scène quelque chose d’original et que je n’avais jamais vu auparavant, auquel même je n’avais jamais songé : on assiste, durant la première partie du spectacle, à une représenation de Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée de Musset. Et pour la seconde partie, Besset nous présente une de ses pièces, écrite en écho à celle de Musset : Je ne veux pas me marier. Les deux pièces, ou scènes, (elles sont de courte durée), traitent du mariage, mais, et c’est là tout le génie de Besset, la manière de l’aborder est différente sur certains points … et identique sur d’autres ! En effet, les deux courtes pièces représentent un couple abordant la question du mariage. Chez Musset, il s’agit d’une demande d’un homme à une femme : la femme semble garder le dessus et jouer avec cet amant qui est entré chez elle, se plaignant de ce que les hommes sont toujours les mêmes, faisant toujours les même compliments, sans renouvellement. N’empêche, dès qu’il lui demande sa main, elle se plie à son désire : elle place toute sa confiance en cette convention qu’est le mariage. Dans la seconde pièce, Jean-Marie Besset met en scène un couple de 2008, la veille de leur mariage. Le futur mari rend visite à sa future femme. Mais tout d’un coup elle hésite sur le mariage et ce qu’il implique, les changements qui le suivent, tout cela la stresse et elle se pose beaucoup de questions. Là aussi, le mari est un peu débordé.
Ainsi, les deux pièces peuvent s’étudier en parallèle : l’homme reste le même, ou presque, et est d’ailleurs interprété par un même acteur : Adrien Melin. La femme, en revanche, évolue, et va même jusqu’à dire tout et son contraire entre les deux scènes.
Dans la première scène, qui met en scène un Comte et une Marquise, c’est Blanche Leleu qui tient le rôle de la femme. Son jeu n’est pas toujours très juste et rappelle presque par instants celui qu’elle avait dansCe qui arrive et ce qu’on attend alors que les deux pièces n’ont rien en commun. Elle reste quand même bonne actrice et son personnage est crédible malgré quelques manières trop contemporaines. C’est comme si elle avait juste enfilé un costume de Marquise pour la forme, mais sans travailler vraiment le fond. Enfin, j’exagère, car on perçoit le travail derrière tout ça, mais peut-être pas entièrement fini … Mais il faut avouer que son rôle n’est pas évident à interpréter et que Musset est extrêment difficile et délicat à jouer et à mettre en scène …
Dans la seconde scène, cette femme stressée en plein préparatifs de mariage, pleine de doutes et de question sur elle, sur son mari, sur eux deux et leur avenir, est interprétée par Chloé Olivères. Je ne l’avais jamais vue jouer, et je suis très contente de l’avoir découverte : c’est une excellente actrice ! Enervée puis aimante, avec des appétits sexuels variés, elle va au fond des choses et est très nature sur scène ; elle ose tout et fait même des abdominaux tout en parlant avec Tigrane, son futur mari.
Mais celui qui semble porter le spectacle, celui qui enchaîne le Comte et Tigrane, soit des personnages vivant dans des époques différentes, dont les moeurs et les types de dialogues ont changé, c’est Adrien Melin. Cet acteur, que j’avais déjà vudans plusieurs pièces, est extraordinaire. Il a beau jouer dans les deux scènes, lorsqu’il arrive dans la seconde après avoir changé de costume, on en vient à se demander si c’est le même acteur. Il faut dire qu’il ressemble vraiment à un Comte dans la première. Poli, respectueux, amoureux, au ton courtois et aux manières élégantes, il ne ressemble plus au Adrien Melin que j’avais l’habitude de voir au théatre. Mais lorsqu’il arrive après la courte pause musicale … Il s’est littéralement transformé ! Il parle d’un ton plus pressé, peut-être moins charmeur, sa gestuelle et sa manière d’occuper l’espace n’ont plus rien à avoir avec « avant » : il bouge plus, s’agite, s’énerve aussi. Son jeu est sans cesse renouvelé, tout est inattendu et on est sans cesse étonné : d’abord il s’entête car il ne comprend pas ce que souhaite Vivien, sa future femme. Puis il finit par lui faire avouer qu’elle ne veut pas se marier … Finalement, on entend la chanson de Julio Iglesias, Vous les femmes. Et, tout d’un coup, il se met à danser sur scène. Mais il ne fait pas qu’esquisser pas quelques pas, non ! Ce qu’il fait est digne d’un véritable danseur ! Ces gestes, sa précision, et son rythme sont absolument parfaits. C’est sans doute mon moment préféré du spectacle … Je ne m’y attendais pas et l’effet était évident : on est subjugué par son talent. Une telle perfection est quasi-inexplicable et je risque de gâcher le passage en essayant de le raconter. C’est incroyable, il faut le voir le pour le croire.
Au final, si l’on compare les deux scènes, on peut dire que la seconde déborde d’idées concernant le mariage … Se marier ?Ne plus se marier ? Partir en voyage ? Rester ici finalement ? Toutes ces questions que l’on ne retrouve pas dans la première scène, où il se contente de courtiser la Marquise jusqu’à lui demander sa main, qu’elle accepte presque immédiatement … Mais d’un autre côté, la première scène est plus en finesse, et semble peut-être plus légère, en tout cas en surface … C’est également là qu’Adrien Melin excelle : ce changement de genre ne semble lui poser aucun problème et il affronte la difficulté avec tant d’expertise qu’aux yeux du spectateur, cela paraît presque naturel et facile. Un grand bravo pour ce Grand acteur qui a une magnifique carrière devant lui !
Donc, même si on sent que la seconde pièce est dirigée par la main de l’auteur lui-même, et que celle de Musset semble moins travaillée, ou moins approfondie, peut-être n’est-il pas allé totalement au fond des choses, le spectacle reste un vrai moment de plaisir ! Voir de telles performances et découvrir de si jolies et intéressantes pièces est toujours une joie pour une passionnée …
Un excellent spectacle : à voir et à revoir au Théâtre de l’Oeuvre à partir du 14 février 2012 !
(J’ai revu le spectacle et ai rédigé un court article en conséquence : ici)
[…] voir ma première critique et ainsi avoir plus de détails, rendez-vous ici […]
J’aimeJ’aime
[…] qu’on attend (JM Besset), puis Thomas Chagrin (Will Eno) et Masques et Nez, et enfin dans Il faut je ne veux pas (Besset) qui se joue en ce moment, à l’Oeuvre. Et chaque fois, j’avais […]
J’aimeJ’aime
[…] en découvrir d’autres, et j’ai lu, vu des DVDs, et d’autres de ses pièces (Il faut je ne veux pas) […]
J’aimeJ’aime