Volpone, Théâtre de la Madeleine

Volpone.jpegCritique de Volpone, de Ben Jonson, vu le 15 septembre 2012 au Théâtre de la Madeleine
Avec Roland Bertin, Nicolas Briançon, Anne Charrier, Philippe Laudenbach, Grégoire Bonnet, Pascal Elso, Barbara Probst, Matthias Van Khache, et Yves Gasc, dans une mise en scène de Nicolas Briançon

Regardez Roland Bertin se tordre de douleur sur son faux lit de mort. Volpone, c’est lui. Un vieil homme en parfaite santé, riche, et qui se fait passer pour extrêmement malade en se jouant des différents personnages venant chez lui pour une chose : apparaître comme héritier sur son testament. A droite de cette photo, c’est Mosca, le parasite de Volpone. Peut-être un des êtres les plus noirs et les plus affreux du théâtre, avec Iago. 
L’histoire est sombre, vraiment sombre. Tous les personnages présents sont des ordures, qui ne pensent qu’à l’argent. Pourtant, on rit beaucoup. Jusqu’à la scène finale, le rire est au rendez-vous. Sans doute dû et aux quelques retouches du texte par Nicolas Briançon, et à la troupe formidable qu’il a réunie sur scène. Les deux ensemble donnent un spectacle parfait. 
Tout d’abord, le décor. Haut, sombre, composé de nombreux coffres, contenant les biens de Volpone … Au début de la pièce, les 3 danseurs que nous retrouverons à plusieurs reprises par la suite nous présentent ce décor, ouvrant les coffres pour nous montrer l’importance des possessions de Volpone. Ouverts, ces coffres scintillent de par l’or qu’ils contiennent, et sont presque la seule source de lumière dans l’appartement de Volpone : sont-ils toute sa vie ? Sûrement. 
Il y a ce genre de pièce éponyme, dans lesquelles il faut trouver L’Acteur, comme l’Avare, Le Malade Imaginaire … En Roland Bertin, Nicolas Briançon a su trouver un excellent Volpone : hilarant lorsqu’il joue le faux malade, ce personnage pourtant infect parvient, par le jeu de l’acteur, à nous toucher, et nous émouvoir … J’ai eu pitié de lui, lors de la scène finale … c’est son visage qui possède un je-ne-sais-quoi d’enfantin et d’innocent qui fait que nous nous attachons à lui, malgré ses manières infâmes. Mais si Roland Bertin m’a beaucoup impressionnée, que dois-je dire de la prestation de Nicolas Briançon, qui signe également la mise en scène ? Le premier mot qui me vient à l’esprit est : Waaaw. Cet homme a quelque chose. Il s’est entièrement approprié son rôle de Mosca, et même s’il paraît joyeux lorsqu’il s’adresse aux autres personnages, il reprend sa véritable nature dès que l’attention n’est plus sur lui. La tête haute et le port droit, son regard de faucon, inquiétant et froid, renforcé par la forme étroite de ses lunettes, tuerait quiconque le croiserait. Diction parfaite, gestes d’une précision impeccable, Nicolas Briançon est parfait. Parfaitement effrayant.
Bien sûr, il faut que je mentionne les autres acteurs, qui sont tout aussi bons. Gregoire Bonnet, Pascal Elso, et Yves Gasc, forment un « trio des intéressés » formidable : tous ont composé leur personnage, tous sont différents : l’un trop énergique, agité, stressé, prêt à donner sa femme pour de l’argent, l’autre inquiétant, rappelant un mafieu, pour lequel toutes les méthodes sont bonnes pour arriver à ses fins (ou du moins la fin de Volpone), et le dernier, plus léger, puisqu’incarnant un vieil homme complètement sourd, et donc entraînant de nombreux comiques de situation. Du côté des rôles féminins, j’ai découvert avec plaisir Anne Charrier, fabuleuse prostituée, dont le jeu est aussi beau que ses traits. Les deux acteurs incarnant les « jeunes » suivent la qualité d’ensemble : un peu niais, avec une grande part d’innocence, on a parfois tendance à les oublier, car ils sont bien moins durs et horribles que les autres rôles. Les ordures ne sont-elles pas bien plus intéressantes que les êtres parfaits ? Enfin, Philippe Laudenbach, tout tremblant (sans doute de trac) lors de sa première apparition, est bien plus convaincant lors de la seconde, interprétant un juge perdu et ne sachant qui croire.
Nicolas Briançon fait désormais parti de ces acteurs/metteurs en scène, dont je suivrai les différents spectacles. Et pour cause : après l’excellence de Jacques et son maître, il signe en Volpone un spectacle inoubliable, inquiétant, drôle, et génant. Incroyable.

Une leçon de Théâtre. A voir impérativement.  ♥ ♥ ♥

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