La première chose qu’on remarque sur cette photo, c’est peut-être le beau sourire de Laurent Stocker. Un sourire et une joie de vivre qui semblent le caractériser si bien. J’aimerais aujourd’hui vous parler de ce comédien que j’admire beaucoup, et dont le nom me réjouit à l’avance lorsque je vais le voir, car je sais qu’il fait partie de ceux qui parviennent toujours à me surprendre, à renouveler leur jeu. C’est un acteur qui se renouvelle constamment, un acteur qui m’étonnera toujours.
Un proverbe arabe dit « Qui veut paraître grand est petit. » Pour Laurent Stocker, le procédé est inverse. Ce acteur de 1m67 fait partie des plus Grands. Né en 1973, il est aujourd’hui un acteur complet : sociétaire de la Comédie-Française, apparaissant au cinéma, César du meilleur espoir masculin en 2008 pour son interprétation parfaite de Philibert dans Ensemble c’est Tout, vu récemment, hors Comédie-Française, jouer avec brio un Prix Martin à l’Odéon… Il est plein de ressources, de vie, de talent.
« Nous voulons de la vie au théâtre, et du théâtre dans la vie. » disait Jules Renard. Et cette vie, il l’a. Sans nul doute, il est l’acteur présentant le plus d’entrain et de vivacité que j’ai vu sur scène. Il brille. Il rayonne. Le Figaro qu’il a incarné sur la scène du Français restera dans les meilleurs prestations de ce valet de génie. En plus de la malice et de l’esprit qui caractérisent ce personnage de Beaumarchais, Stocker y ajoutait sa patte : de son Figaro émanait sympathie et joie de vivre, intelligence et amour.
Vittorio Gassman dit qu’« Au théâtre, le langage est tout. » C’est simple, lorsque Stocker parle, on boit ses paroles. Diction sans faille, évidemment, voix claire, forte, commune mais malgré tout reconnaissable. Moi qui n’avait jamais réussi à accrocher au monologue de Figaro, j’y ai trouvé de nombreuses réponses en l’écoutant par lui. Il ne le récite pas. Il le raconte, il l’explique, il le vit. Il soutient l’attention du spectateur avec une facilité … Et je prends l’exemple de Figaro, mais à chaque apparition, c’est un délice que de l’écouter.
De plus, « L’élément du théâtre est la métamorphose » affirme Heiner Müller. Face à moi, ce n’est jamais le même personnage. Laurent Stocker a une faculté de transformation incroyable. Certes, il est évident que le maquillage aide à se transformer. Mais il y a autre chose. Entre le Mercure d’ Amphitryon, ce Figaro dont j’ai déjà parlé, Philibert, son personnage de Ensemble c’est tout, ou encore Agénor dans Le Prix Martin, je n’ai jamais eu le même homme devant moi. J’aimerais déjà souligner que le personnage pour lequel il a obtenu un César était merveilleusement interprété : l’évolution lente et visible de Philibert est signe d’un réel talent, et son bégaiement est des meilleurs et des plus naturels que je connaisse. Quant à ses autres rôles … J’aurais juré que l’acteur incarnant Agénor avait l’âge du rôle, c’est-à-dire 60 ans. Il avait les difficultés de la vieillesse, le visage marqué, la bouche tirée … De même, pour Mercure, si sa vivacité était reconnaissable, cet air malsain qu’il affichait était tout sauf habituel.
Enfin, comme dit Francis Huster, « Un texte de théâtre est à voir. Un texte de théâtre est à écouter. Est-ce qu’un texte de théâtre est à lire ? » Laurent Stocker sait nous donner à voir. Il me semble bien qu’il est 2e dan de karaté (ou excellent en escrime, ça reste à confirmer), ce qui lui confère une agilité … impressionnante. Sa gestuelle n’en est que plus parfaite. Il faut voir, par exemple son « Qu’il s’avise de parler latin, j’y suis grec, je l’extermine »… La gestuelle est impeccable et produit immanquablement son petit effet comique.
On pourrait dire bien des choses en somme sur Laurent Stocker. Mais je pense que le mieux est de le voir. Il est formidable, prodigieux, brillant, étonnant, renversant, drôle, grandiose, talentueux. Parfait. Pour moi, il fait partie des plus Grands acteurs français contemporains. Je n’ai jamais été déçue par son jeu, sa présence est toujours un bienfait pour la pièce.
Merci pour toutes ces belles et inoubliables soirées théâtrales que vous nous offrez.